Le réalisateur d’origine kurde et de nationalité norvégienne est parmi nous pour l’avant-première de son attachant documentaire «Hiding Saddam», ce soir au Colisée. Un film noté 8,3/10 sur IMDb et qui aborde la personne de Saddam Hussein sous un angle très original et jusque-là peu connu. Le film sortira sur nos écrans dimanche 16 juin à l’occasion de l’Aïd al-Idha, une date qui correspond à celle de l’exécution de Saddam Hussein en 2006. Entretien.
C’est un film qui risque de fâcher les Américains…
Il fallait prendre ce risque, parce que tout ce qu’on a vu jusque-là à propos de l’invasion et de la guerre en Irak était à travers la lucarne de l’Occident. J’ai voulu porter à l’écran l’histoire d’Alaa Namiq, l’homme qui a caché Saddam Hussein et qui a développé avec lui une véritable relation d’amitié. Pour moi, c’est une histoire très originale. J’étais très curieux de connaître l’histoire du souterrain où Saddam Hussein était caché. Au début, j’ai cru que cette histoire de trou dans le jardin était une invention des Américains, mais c’était finalement vrai. J’ai lu un article dans le Washington Post sur Alaa Namiq et j’ai décidé de partir à sa recherche.
C’est un énorme morceau que de raconter un personnage comme Saddam Hussein, mais vous avez pris un angle très particulier avec un traitement cinématographique et un montage très intelligent…
En tant que réalisateur, je suis toujours à la recherche de nouvelles perspectives, surtout avec des documentaires sur des sujets très difficiles comme «Hiding Saddam». L’histoire de Saddam Hussein, en tant que personne, ne m’intéresse pas du tout; il suffit de googler son nom et on peut le découvrir. Ce qui m’intéresse, c’est le trou dans le jardin où Saddam était caché.
En tant que Kurde, vous avez fui la dictature de Saddam Hussein pour vous installer en Norvège. C’est tout de même surprenant que vous fassiez un film qui dépeint le dictateur en tant que simple être humain…
L’histoire du trou qui a abrité Saddam est en quelque sorte mon histoire, parce que je suis né et j’ai grandi en Irak. Je dois donc comprendre l’histoire de ce pays qui a créé Saddam Hussein jusqu’aux moindres détails. Et qui peut me raconter les détails des derniers mois dans la vie de Saddam si ce n’est l’homme qui l’a caché ? Nous avions vu Saddam comme un président, comme un dictateur, mais personne ne l’a vu en tant qu’être humain qui cuisine et qui fait la lessive dans la montagne.
Vous avez dépeint Saddam comme une victime des Américains. En fin de compte, encore une fois, cela va fâcher les Américains…
Une victime selon le point de vue d’Alaa Namiq, qui est la voix principale dans ce documentaire. D’autre part, on sait que les États-Unis ont envahi l’Irak en prétendant que Saddam Hussein détenait une arme de destruction massive. Plus tard, on a su que ce n’était pas vrai. La question qui se pose est : comment peut-on déclencher une guerre qui a fait des milliers de morts et de réfugiés en se basant sur un mensonge ? Tout cela pour un «fake» ? Pour moi, il y a une perspective humaine derrière ce film. Je dois être honnête vis-à-vis de l’Histoire.
Comment ce film a été reçu dans le monde occidental ?
Disons que le film n’a pas répondu à leurs attentes. Personne ne l’a apprécié, mais tout le monde l’a aimé !